Nous n’assistons pour autant pas à un récital des prototypes Ferrari, la météo capricieuse venant – une première fois – chambouler le scénario parfait qu’avaient imaginé les tifosis.
Aux environs de 17 h 40, la pluie fait sa première apparition pendant la course, obligeant les équipes à se positionner rapidement. Plusieurs hypercars chaussent, de manière très précoce, des pneumatiques pluie. C’est le cas chez Ferrari sur la #51, chez Porsche sur la #4 et chez Toyota sur la #7. Partie de l’Hyperpole, la 963 #6 emmenée par André Lotterer (qui relaie très tôt Laurens Vanthoor) fait aussi ce choix – qui se révèle ne pas être le bon. Celui qui survole la concurrence, c’est Robert Kubica. Sa 499P jaune est la seule à être équipée slicks, avec le composé le plus tendre. Dès lors, et avec une piste qui devient de plus en plus sèche, Robert Shwartzman le relaie et s’applique. Il s’échappe. Il construit son avance, seconde par seconde.
Une alerte sérieuse survient toutefois samedi soir. Peu avant 22 heures, la pluie est de retour et on se prépare dans les stands pour l’affronter à nouveau. Une fois encore, la stratégie est la bonne sur la #83. On choisit rapidement les pneus pour chaussée humide – comme sur la 963 #5 – et, avec une pluie persistante, les secondes se perdent par poignées pour les poursuivants : la Ferrari #83 tourne 30” plus vite au tour que ses opposants restés en slicks ! Mais tout bascule à 22 h 37. Robert Kubica revient à pleine vitesse sur la BMW M Hybrid V8 #15 de Dries Vanthoor. Ce dernier ne veut pas se faire prendre un tour, car rester dans la même boucle que le leader peut s’avérer décisif en cas de sortie des voitures de sécurité. Le contact envoie la machine allemande dans le mur. Elle est si fortement endommagée que Dries Vanthoor doit mettre pied à terre. Jugé coupable d’avoir tassé ce dernier, Robert Kubica écope de 30 secondes de pénalité lors de son arrêt suivant. Cette punition, purgée à 00 h 30, fait reculer l’hypercar jaune. Jamais elle ne sera revue en haut d’une feuille de classement (à 12 heures le dimanche, Yifei Ye l’immobilise devant son stand avant qu’elle ne soit rentrée, abandon).
L’attente
Se dessine une bataille à trois entre Porsche Penske Motorsport, Toyota Gazoo Racing et Ferrari AF Corse.
On ne retrouve pas l’unique Isotta Fraschini, qui connaît une très belle première participation, mais ne peut se battre devant. Dans le clan Lamborghini, les SC63 sont encore là, fiables, mais loin. BMW non plus ne peut pas fêter de la meilleure manière le 25e anniversaire de la victoire de la V12 LMR. La M Hybrid V8 #15 est éliminée suite au contact avec la Ferrari 499P #83. La #20, elle, était déjà hors séquence dès le début de l’épreuve, avec plusieurs problèmes techniques pour ce grand retour.
Dans la nuit, on ne compte malheureusement plus de forces françaises capables de gagner, Alpine ayant rencontré des difficultés en début de soirée avec ses moteurs, et Peugeot ayant quitté le tour de tête après seulement 2 h 45 d’épreuve.
Des hypercars encore dans le coup (elles sont encore une dizaine à minuit), c’est la Toyota GR010 Hybrid #8 Toyota Gazoo Racing de Sébastien Buemi/Brendon Hartley/Ryo Hirakawa qui traverse la nuit devant. Sur toutes les feuilles de chronométrage officielles, de 1 heure à 9 heures du matin, la machine nippone est au top. Comme dans la plus pure tradition des 24 Heures du Mans, ce cavalier nocturne permet-il à Toyota de construire sa victoire ? Non. La lecture brute des résultats est un leurre. Car cette édition 2024 est imprévisible.
En réalité, le trio Ferrari-Porsche-Toyota se toise, s’observe, se défie. Mais les pilotes ne se battent pas. Les conditions météorologiques effroyables poussent la direction de course à faire sortir les voitures de sécurité. Le Mans est en pause. Pour mieux repartir.
Les pilotes sont comme des lions en cage et espèrent des conditions meilleures pour partir en chasse. Impossible de dépasser, impossible de faire parler ses arguments. Il faut être appliqué, essayer de bien économiser le carburant et ne pas faire d’erreur dans les stands. Certains pilotes bavardent avec leur ingénieur à la radio, pour vaincre l’ennui et la monotonie. D’autres apprécient ce calme, qui n’est que temporaire. Car le sprint va redémarrer.
L’emballage final
À sept heures du but, 11 voitures sont encore dans le tour de tête et peuvent prétendre à la victoire. Il ne pleut plus : la bataille est intense au sein de ce peloton, avec des affrontements multiples. On se rend coup pour coup entre hypercars.
Toutes les marques ne répondent pas présentes. Cadillac perd deux voitures. Fuite d’huile sur la Cadillac V-Series.R #3 (Sébastien Bourdais/Renger van der Zande/Scott Dixon) et accident spectaculaire pour Pipo Derani sur la Cadillac V-Series.R #311.
Porsche aussi souffre. La 963 #4 percute le mur de pneus à Indianapolis (avec Felipe Nasr). Au rythme, les 963 #5 et #6 semblent moins à l’aise. Les pilotes ne parviennent pas à hausser leur niveau pour chercher les dixièmes qui font la différence.
Le rythme s’accélère à l’entame des quatre dernières heures. Longtemps c’est le 46e tour d’Antonio Fuoco en 3’29”208 qui est resté le meilleur temps. Mais à 12 h 15, la marque tombe. Alex Palou (Cadillac V-Series.R #2 Cadillac Racing) impressionne : 3’28”938 au 253e tour – avant que Kamui Kobayashi (Toyota GR010 Hybrid #7) n’améliore en 3’28”756 au passage suivant.
Un peu avant 14 heures, la pluie revient. Doucement, d’abord, puis de manière plus intense dans tout le premier secteur, de la ligne droite jusqu’à la chicane Daytona. Certains craquent. Brendon Hartley part à la faute à Mulsanne avec la Toyota GR010 Hybrid #8 suite à un contact avec Alessandro Pier Guidi (Ferrari 499P #51). A 16 h, c’est donc la Ferrari 499P #51 qui franchit la ligne en premier, devançant la Toyota GR010 Hybrid #7 et la Ferrari 499P #50.
LMGT3
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